Semons l'Amour

Marathon 74/100 : 63 km, (Güzelyali – Golyaka, rive du lac Iznik Golu)

Mais qu’est-ce que c’est que cette journée ?!

Ce matin, j’avais la ferme intention d’une journée courte pour me reposer des précédentes. Gérer quelques trucs avant de me retrouver en plein cœur de la Turquie version campagne…

Aparté dans le ciel.

Jésus : non mais ça va pas du tout. Il croit que c’est lui qui décide.

Dieu : Ben des fois oui.

Jésus : ben excuse-moi, mais qu’il prie de toutes ses forces pour que des Barbapapas sortent des fusils et il pourra vérifier le goût par lui-même.

Ce sont les hommes qui décident !

Tu blasphèmes mon gentil garçon, s’amusa Dieu. Et mon job de créateur à moi ?

Jésus : oui bien sûr. Mais j’ai l’impression que ta création, elle t’échappe un peu ces temps-ci.

Que tu crois, sourit son père, un brin mystérieux.

18 km pour rejoindre le port. Ça va pas mal. Un bateau pour traverser la mer de Marmara. Qui d’ailleurs est prise entre la Mer noire et la Méditerranée. J’ai honte, jusque là, j’étais persuadé qu’il n’y avait qu’une vraie Mer, la nôtre bien-sûr.

Et enfin 22 km pour rejoindre un hôtel qui apparaissait comme disponible.

J’avance bien jusqu’au port. Je suis le seul à pied, les gens sont déjà disciples de Yusuf. Adorables !

Café, croissant, horaires qui s’ajustent au poil. Quel bonheur de se laisser porter par le gros bateau. Il me berce, je sombre. A mon retour et à l’arrivée dans l’autre port, pleine forme. Je fonce sur l’hôtel 22 km plus loin.

Sauf qu’en arrivant, je sais déjà que je ne vais pas dormir là. Une musique qui m’agresse un peu, la proximité de la route, peut-être aussi une étrange envie de courir encore. D’aller vers les montagnes que j’aperçois, de dormir près du lac que j’ai vu sur la carte, de raccourcir la prochaine étape, d’avoir un peu d’aventures quoi.

“No rooms” me signale-t-on à l’accueil ! Internet ment affirme l’homme attentif davantage à sa machine qu’à mes besoins.

Ne jamais forcer le chemin…

Nouvelle micro sieste au bord de leur piscine et zou, c’est reparti.

Aparté.

Marie-Christine Martin (chef du cabinet à la mairie d’Angers) : Alors, c’est sûr monsieur Christophe, c’est fini Paris ? Je trouve vous étiez tellement incroyable comme ministre de… De…

Christophe B. : de l’Ecologie Marie-Christine… Bon sang, c’est important l’écologie.

Tiens, sans transition, il en est où ce type qui pense qu’on peut arrêter la guerre avec des petits cœurs ?

Marie-Christine : ah ben c’est marrant que vous parliez de lui, on le suit avec des copines. Il est incroyable. Il vient de faire 63 km pour son 74e marathon. Je crois qu’il peut y arriver.

Christophe B. : non mais arrêtez la guerre ! Vous me faites peur Marie-Christine.

Quoi !? Pourquoi vous me regardez comme ça ?

Vous voulez pas non plus qu’on lui fasse une statue !? Il y a une place en ce moment… Ahahah !

J’arrive à un col, longue descente. C’est n’importe quoi. Jamais couru aussi vite. J’aperçois une station service, je lève les bras, comme à une arrivée triomphante. Le pompiste essaie de me faire redescendre sur terre, un mégot à la bouche et un saut d’essence à la main.

Heureusement, un peu plus loin, je rencontre Kemal. Il tient avec sa famille ma boutique de ravitaillement suivante. Je ne sais pas pourquoi on a plaisir à bavarder, à faire des blagues en anglais.

Ce sont mes meilleures.

Il s’étonne de mon âge. J’ai eu la chance de ne pas comprendre dans quel sens.

Sa rencontre, me donne l’énergie dont j’avais besoin pour descendre jusqu’au lac.

Un peu au bout de ma vie, un petit chien m’accompagne à son tour pendant 3 km. Malgré nos passionnantes conversations, il finit par admettre que je suis le pire plan de sa vie.

Il y a les champs de pêches, de brugnons et puis le lac, les hommes qui préparent des bûchettes pour faire chauffer le thé, les tentes, ceux qui lisent, concentrés, Émile Zola en regardant l’horizon, ceux qui empilent les bières et ceux qui préfèrent les prières et tant d’autres.

Envie de me faire offrir un thé mais j’ai aussi envie d’en finir pour aujourd’hui.

L’hôtel réservé apparaît enfin. Le beau papa du propriétaire m’accueille avec sa femme. J’apprends vite qu’en fait, Internet est encore accusé pour un problème sur ma réservation. La perspective de nuit dehors se dessine. Il est 20h.

Je ne sais pas qui décide, mais moi je suis sûr que je vais dormir là dans une belle chambre qui va me plaire. Alors on bavarde. L’adorable beau papa me montre la meilleure vue depuis le jardin. J’explique mon plan pour la paix dans le monde. Lui vit à Istanbul. Il propose de plutôt fumer une cigarette et ne pas trop se prendre la tête.

Emrah, le beau fils proprio arrive et me cherche une solution. Beaucoup d’options défilent. Et finalement, j’ai la chambre royale. Il me conseille ce restaurant où l’on déguste le houmous entre le lac et le joueur de loud.

Au loin, sur l’autre rive du lac, un feu d’artifice.

A demain, pour un tout petit marathon…

Bon sang, c’est qui qui décide.

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