Marathon 79/100 : 19 km, (Yoncali – Kutahya)
Aujourd’hui j’ai choisi de faire une étape très courte. Pour profiter de la grande ville de Kutahya.
J’ai notamment eu l’occasion de rencontrer l’artiste coiffeur Mustafa.
Mustafa a pris un soin infini à me redonner une apparence humaine. Au bout d’un moment, tel un corsaire, un ciseau entre les dents, il s’est demandé si je n’aurais pas pu trouver un barbier plus près de chez moi.
Alors j’ai expliqué pourquoi j’étais à Kutahya. Ça impressionnait les enfants à qui j’ai dit que je me battrais jusqu’au bout pour un monde plus juste, notamment pour que j’ai moi aussi d’aussi beaux cheveux qu’eux.
Il n’a pas voulu que je paie. Sans doute s’est il dit qu’avec des blagues aussi pourries, il ne fallait pas trop m’en demander. N’empêche ça ce sont vraiment des cadeaux fous.
Une journée plus courte aussi parce que les derniers 1000 km me semblent de plus en plus difficiles. Avec la baisse d’énergie physique peut vite partir l’énergie mentale.
Je reste en moyenne au-dessus des 42,125 km journalier (42,28). Donc j’espère que cette semi-copure m’aide à repartir pour les prochains.
Ça me permet aussi d’affiner les prochains parcours.
Et puis de dédier cette journée à plusieurs personnes.
A Kamel et à sa famille et aux habitants de son village de Rmeich au Sud du Liban. Il a 74 ans. Il rêvait il y a une dizaine d’années d’y retourner. Mais la guerre l’en a dissuadé.
Il y a quelques mois il m’a écrit. Nous avons échangé autour du projet. Il m’a conseillé des itinéraires qui peut-être pouvaient être envisagés. Et finalement, il m’a dissuadé d’essayer vu l’escalade.
Alors c’est dérisoire sûrement, mais j’aime me connecter aux prières de Kamel pour ses proches, que je connais pas, là-bas.
La seconde dédicace, c’est pour Julien Bedouet. Il habite ma ville de 6300 habitants et je lui ai demandé s’il serait ok de m’aider en février dernier pour faire partie du groupe qui m’aiderait aux différentes étapes de mon projet : aider un soldat à déposer son arme.
Comme je le sais capable de construire des empires et comme je me sais capable de produire des projets mais sans du tout mobiliser les foules, j’ai pensé qu’il était l’homme de la situation. Pour moi, je pensais qu’en me levant pour aller arrêter ceux qui s’entretuent, j’étais à l’image d’un grand tout prêt à réagir et qui n’attendait qu’un déclic.
J’étais prêt à être une des tentatives de déclics parmi d’autres.
Nous ne sommes toujours pas un million en route, (mais comme disait Beckett : “déjà essayé. Déjà échoué. Peu importe. Essaie encore. Échoue encore. Échoue mieux”), mais je lui dois d’avoir architecturé la communication : site internet, campagne de mails, réseaux sociaux. Et aussi de m’avoir beaucoup fait réfléchir à ce que je voulais dire et comment le dire.
Mais le plus important, c’est que lui, comme toute l’équipe qui m’a accompagnée dès le départ, s’ils n’avaient pas été là pour y croire, j’aurais eu beaucoup beaucoup plus de mal à me lancer.
Au fil des prochains jours (voilà qui va me motiver à tenir un jour de plus chaque jour), je vais transmettre leur (nos) interview avant mon départ. Je les vois aussi comme le témoignage que chacun peut avoir sur le grand sujet : qui es-tu ? Et en quoi l’Amour ça te parle ?
Chiche de répondre ?
Merci à Joël Guegen qui a réalisé ces interviews et à son ami Alexandre Godard pour la réalisation et le montage.
Sachez qu’ils sont tous 2 professionnels et que ce travail, ils nous l’ont offert.
L’avant-dernière dédicace, c’est pour commencer à vous dévoiler le nouveau plan.
Il peut m’arriver d’être assez critique envers les journalistes qui reprennent les dépêches AFP, sans interroger l’information, la vérifier, poser des contrepoints, les contextes, les nuances. Même si c’est parce que ce sont les rédactions qui le demandent.
Mais essentiellement, il y a des reporters de guerre aux vies et au courage incroyables, des journalistes impliqués pour faire connaître des cultures, des musiques, des histoires. Les correspondants locaux quasi bénévoles pour montrer toutes les initiatives constantes, les journalistes d’investigations et les rédactions qui se démènent pour avoir les moyens que le public puisse accéder à la vérité par lui-même.
Et puis il y a cette série de 5 portraits de couples d’amoureux et par ailleurs très âgés dans le courrier de l’ouest.
Il s’agit de Ginette et Christian. En écoutant leur amour, qui est venu les surprendre, je me suis dit que la plus grande des résistances aux guerres était la leur. C’est flagrant je crois !
Je crois aussi, si je suis honnête, que je prendrais les armes si celle que j’aime était menacée. Mais je sais de manière certaine qu’elle aurait le cœur brisé si je tuais en son nom.
Merci à Camille Riveccio de nous ramener, à travers leur amour, à l’essentiel.
La dernière dédicace elle est pour vous. Vous qui me faites l’honneur de me lire. Merci pour tout ce que vous m’apportez. Vous m’aidez à continuer.
Antoine VERNIER, sociologue, vit à Angers dans une cabane sans eau et sans électricité.
En 2022, il court 23 marathons de suite jusqu’à Davos. De ce voyage, il réalise un documentaire « Et si on parlait d’amour !? » et en écrit un livre qui porte le même titre.