Marathon 78/100 : 53 km, 900 D+ (Domanic – Yoncali)
PS : oui certains PS sont au départ. C’est quand c’est important. Quand Simon, par exemple, a été très heureux de recevoir tous vos messages pour son anniversaire.
Voici ses mots…
PPS : Ouah tous ses gens que je ne connais pas. Incroyable !!! Tu pourras leur dire “merci”. Si tu as le temps… (…)
Ce qui est bien, c’est que demain sera un autre jour.
En rallongent le parcours global de 4 km, j’ai pu passer de 61 km prévu aujourd’hui à 53. Rapport à atteindre un hôtel pour bien récupérer. Jusqu’à Antalya ce sera compliqué.
J’arrivais à courir correctement en partant mais plusieurs éléments ont fait que le marathon d’aujourd’hui rentre facilement dans le top3 des plus durs.
Et je dois de l’avoir terminé sans recours à l’ambulance à Moussa, Mehmet et Ramaza.
Rien acheté à déjeuner hier soir parce que je me disais qu’il y aurait des boulangeries ouvertes comme d’habitude. Erreur…
Il n’y en avait ni dans le village de départ, ni dans les 2 suivants avant de grimper dans la montagne. Montagnes qui ressemblent à l’Ardèche. Beaucoup de pins à perte de vue, de relief, de cailloux et d’absence de civilisation.
L’ennui, c’est que je n’avais pas percuté que la traversée de cette montagne, c’était des petits chemins certes très agréables pour les articulations et pour les yeux mais très pentus et surtout jamais droits. Donnant ainsi une impression de ne pas avancer du tout.
Et puis beaucoup de fontaines mais toutes à sec.
Alors km17, il s’était déjà écoulé 3h30, j’étais en train de ralentir encore tout en me disant, si toute la traversée de la montagne est sans eau et sans nourriture, ça va faire un chouette défi. Mais, dont je me passerais volontiers.
Je rationne ce qui me reste d’eau… Au début et puis foutu pour foutu je me fais plaisir en dégustant mes 3 dernières gorgées.
Km26, j’atteins un micro village. 10 maisons dont 3 non habitables. Je me dis là il faut trouver quelqu’un qui te donne au moins du pain. Les gens mangent forcément, même s’ils n’ont pas l’électricité.
Il y a une mosquée… Donc de l’eau… Oh, un prunier… Je lui dévore ses fruits.
Il y a un monsieur ronchon. Il lui reste une dent et c’est atroce de penser que c’est sa meilleure.
C’est là qu’arrive Moussa et Mehmet. Moussa est venu avec sa femme et sa fille chauffer de l’eau de la source pour laver le linge. J’explique ma situation. Mehmet s’alerte. Il décide immédiatement de prendre les choses en main. On se croirait soudain dans l’écurie Ferrari un jour de grand prix. Il prend mon bidon va le remplir. Puis il se hâte d’aller à sa voiture et revient avec un sac rempli de pain et 2 tomates.
J’exulte ! J’étais sûr que j’allais bien remanger un jour.
Vraiment, à ce moment là, je ne vois pas comment j’aurais pu terminer sans ces morceaux de pain.
Mais ce qui me touche le plus, c’est la manière dont il s’est empressé d’aller me chercher à manger alors qu’il ne savait encore rien de mon projet.
Juste il voyait un gars qui n’avait pas de vélo et qui se plaignait de la faim.
Sur la seconde partie, il y avait autant de fontaines et elles abondaient d’eau fraîche… Mais je manquais de sucre.
Km49, avec la chaleur, le nombre d’heures sur la route, mes 2 tomates et le pain commençaient gentiment à me faire rentrer dans un état modifié de conscience de type hypoglycémie.
C’est à dire que je commençais à être sûr qu’Erdogan avait demandé à ce qu’on construise des routes pour m’aider à aller à Jérusalem. D’où les tractopelles sur le bord de route. Je pensais même que j’allais tellement vite que les petits chats au bord des routes étaient projetés en arrière.
Un éclair de lucidité et une longue expérience de ce type d’état m’a conduit toutefois à penser que si je ne trouvais pas de sucre, je m’arrêterais dans moins de 2 km. Soit pas très loin de l’hôtel mais quand même pas dedans.
Alors j’ai prié mentalement en arrivant dans le dernier micro village qu’il y ait une personne qui prie pour pouvoir offrir un orangina à un étranger en short.
Je bifurque à un angle de rue pour me retrouver face à la mosquée. 4 hommes boivent du thé. Thé = sucre…
Ramaza tient le café. Il me serre la main. Il est heureux de voir quelqu’un dont il se demande ce qui le rend si heureux. Alors il s’assoit avec moi. On bavarde. On raconte mon projet aux autres. Je lui dis qu’il est un être divin. On est en face de la mosquée alors il sourit modestement. J’avoue au bout d’un moment mon problème d’avoir envie de dévorer un ours. Si possible en chocolat.
Alors il se lève d’un bond et revient avec un paquet de gâteaux à l’orange. Puis il insiste pour aller remplir mon bidon.
Voilà, il y a des jours comme ça, où je galère avec ce projet mais où on m’envoie des anges pour m’aider et me rappeler que c’est important.
Tranquille devant la piscine à présent, je vais aller passer du temps sur les cartes. Il faut que j’arrive à faire des étapes plus raisonnables et pouvoir manger et dormir dans de bonnes conditions…
D’ailleurs, si je parviens à Antalya pas impossible que je fasse les derniers marathons autour d’un hôtel pour vacanciers en attendant de prendre mon bateau vers le destin…
Bonne soirée à tous.
Merci encore de votre présence dans ce projet.
PPS : Grâce à moi vous allez avoir envie d’une glace non ?
Antoine VERNIER, sociologue, vit à Angers dans une cabane sans eau et sans électricité.
En 2022, il court 23 marathons de suite jusqu’à Davos. De ce voyage, il réalise un documentaire « Et si on parlait d’amour !? » et en écrit un livre qui porte le même titre.